Jusqu'à midi, ça allait... Bien... Autant Grégoire que moi, on avait le moral, on était confiants face à ce qui nous arrive... à ce qui arrive à notre tout petit.
Faut dire qu'on a été aidés. Aux Etats-Unis c'est le mois de sensibilisation au Spina Bifida. On peut dire que les parents des enfants atteints ne ménagent pas leurs efforts pour communiquer sur cette malformation. On ne compte plus les blogs qui en parlent sous toutes les formes, de l'exposé le plus scientifique au récit le plus personnel.
Notre blog préféré, celui de la Maman de Caleb, est une vraie bouffée d'espérance.
Déjà en temps normal, Cassie (c'est le nom de cette blogueuse) parle magnifiquement bien de son quotidien, de ses deux enfants, des soucis et des bonheurs que lui cause son aîné. Mais depuis le 1er octobre, elle a eu l'idée incroyable de présenter chaque jour deux ou trois enfants comme le nôtre, avec des liens sur leur journal.
Depuis, chaque soir avant d'aller au lit, mon mari et moi, on se réconforte devant tous ces gosses heureux aux sourires éclatants, et surtout devant les textes qui accompagnent chaque photo. Les parents sont en effet invités à décrire ce qu'ils auraient voulu savoir *avant*, qu'ils ont découvert *après*.
Il n'y en a pas un qui à leur manière n'ont pas décrit leur petit ange comme une bénédiction, un arc-en-ciel qui illumine leur vie. Et tous sont unanimes : les médecins ont toujours prédit le pire pour l'avenir de leur petit, alors que tous ont réussi à faire des trucs que soit-disant jamais ils n'auraient dû être capables de faire !
C'est bizarre, mais à force de faire connaissance avec tous ces bouts-de chou, on en arrive presque à se dire que ce n'est pas si grave...
Jusqu'à midi, au moment où j'ai ouvert la boîte aux lettres, et que je voie cette histoire en première page du journal :
Une handicapée a été refusée à l'entrée d'un restaurant pourtant quasiment vide, sous prétexte que les lieux ne sont pas adaptés à son fauteuil électrique, que les tables sont trop basses et autres idioties de ce genre.
Et là, ça a été la baffe. Le gros coup de massue. Le cafard et l'angoisse sont revenus.
L'apocalypse a prit forme, avec les images de notre petit garçon en chaise roulante, luttant pour se faire accepter, pour participer aux jeux de ses camarades, pour affronter le regard des gens apitoyés ou voyeurs...
Ah, Matilda... ce sont dans des moments comme ça que je regrette tes visites de soutien, tes histoires délirantes pour me changer les idées quand mon Grégoire travaille et que j'ai un coup de blues...
Heureusement que j'ai dû aller travailler cet après-midi, et que mes collègues m'ont bien remonté le moral. Mais ça n'empêche rien, je suis retombée sur terre, et ça fait peur !