Qui l'aurait cru, qu'à quelques années de la retraite, je découvre enfin le boulot qui me corresponde ?
Eh ben oui. Après avoir *dégommé du Viet* (Dieu que je n'aime pas cette expression , et
surtout que je n'aime pas avoir eu à y aller) ; joué les détectives de choc pour le gouvernement ; vendu des granulés pour bovins et des engrais aux paysans du coin ; et passé des années à
descendre dans la mine en expliquant l'histoire de l'asphalte à des visiteurs qui n'en avaient la plupart du temps rien à battre, j'ai enfin touché du doigt ce pour quoi j'étais vraiment fait
!
Ouais, bon, c'est vrai que j'ai dit ça après mes premiers jours de guide. Mais cette fois, c'est vraiment ça. Je ne suis plus un gosse, et je sais ce qui me convient !
Et vous pouvez dire ce que vous voulez, tout est réuni pour le prouver : le boulot de tenancier de bistrot est fait pour moi !
Comment je le sais ? Parce qu'à priori, absolument rien ne me destinait à franchir la porte de ce troquet d'habitués, coincé sur une rue adjacente à celle de l'Hôtel de Ville.
Mais il y a eu cette sortie foireuse avec une Josette. C'est elle qui m'y a traîné, pour vider sa deuxième bouteille de vodka. Pendant qu'elle se *torchait*, j'ai eu tout le loisir de faire la connaissance du patron. C'est un gars sympa, qui a à peu près l'âge de Marcel, et qui tient son bar depuis 40 ans. Et c'est ça qui est fabuleux, le décor ne doit pas avoir changé depuis. Il y a une âme, une atmosphère là-dedans, ça réchauffe rien qu'en entrant ! C'est un coin uniquement d'habitués, tout juste s'ils ont pas leur nom gravé sur leur verre, et un cadenas sur leur chaise !
Enfin bref, j'ai proposé mes services comme ça, juste pour changer et parce que le Jules, il m'a fait un peu pitié, avec sa peine à se traîner. Et j'ai adoré servir les ballons de rouge et écouter les clients refaire le monde en tapant le carton !
Depuis, j'y suis retourné régulièrement et samedi, ça a été mon grand jour, le premier où j'étais seul pour tenir la boutique pendant qu'il allait au mariage d'une
de ses petites filles.
J'ai pas vu le temps passé, et j'aurais bien volontiers remis ça hier, si je n'avais pas eu à bosser pour gagner ma croute.
Mais c'est décidé. Jules m'a demandé si ça m'intéresserait de reprendre son établissement... Bien sûr, je vais pas prendre la décision comme ça sur un coup de tête,
mais ça me démange vraiment. Il faudra que je demande l'avis des autres, pour m'éviter de faire une connerie, ne serait-ce que sur le montant à mettre là-dedans, mais une chose est sûre, un jour
ou l'autre, je vous inviterai chez moi... Je sens que je vais m'endormir vite, en réfléchissant au nom de mon bistrot...